Accès aux traitements contre le VIH, la tuberculose et le cancer : les freins persistent au Sénégal

Au Sénégal, comme dans de nombreux pays à revenu intermédiaire, l’accès aux médicaments essentiels reste semé d’embûches. Des problèmes de disponibilité, de coût, de qualité, ainsi qu’une logistique parfois défaillante rendent difficile la prise en charge efficace de maladies graves comme le VIH/Sida, la tuberculose ou encore le cancer.

Médicaments « traceurs » : des obstacles multiples identifiés

Une étude récente, pilotée par le Pr Papa Gallo Sow de l’Université Alioune Diop de Bambey, a mis en lumière les défis majeurs liés à l’approvisionnement en médicaments dits « traceurs ». Ces médicaments, cruciaux dans la lutte contre des maladies telles que le VIH, la tuberculose, le cancer et pour la vaccination, font face à plusieurs barrières structurelles et économiques.

Parmi les principaux freins, l’étude souligne :

  • Le coût élevé des traitements, en particulier ceux encore protégés par des brevets ;
  • La rareté des fournisseurs, rendant certains médicaments tout simplement inaccessibles ;
  • Des retards de livraison fréquents, provoquant des ruptures de stock ;
  • Un manque de planification et de prévision dans les commandes.

Des systèmes d’approvisionnement inadaptés

Le Pr Sow note que le processus d’acquisition des antirétroviraux (ARV) suit un schéma distinct et souvent inefficace. Les retards de livraison récurrents accentuent les tensions dans les chaînes de distribution.

Concernant les médicaments de deuxième ligne contre la tuberculose, la situation est tout aussi préoccupante. Leur achat n’est pas inclus dans les subventions de l’État, et la planification repose sur les consommations précédentes, ce qui crée des incertitudes et des pénuries.

En oncologie, le problème du coût est particulièrement criant. Le traitement de 12 semaines peut coûter entre 600 et 1 000 dollars américains. Même les versions génériques restent chères, allant de 200 à 300 dollars.

Vers des solutions concrètes : recommandations et plaidoyer

Face à ce constat alarmant, le Pr Sow recommande la mise en place d’un système de veille pharmaceutique pour mieux anticiper les écarts entre les besoins réels et les médicaments effectivement acquis. Il plaide aussi pour le recours aux licences volontaires, qui permettraient de contourner les brevets et d’encourager la concurrence, donc une baisse des prix.

Le spécialiste appelle également à une implication plus forte du Sénégal dans les négociations internationales et les programmes régionaux tels que ceux de l’Union africaine, de la CEDEAO ou de Gavi. Ces initiatives facilitent l’harmonisation réglementaire et les achats groupés, des leviers importants pour améliorer l’accès aux traitements.

Enfin, parmi les solutions proposées figure la mutualisation des achats pour les traitements coûteux et la création d’un pôle de production pharmaceutique sous-régional, une stratégie qui renforcerait l’autonomie des pays africains dans la fabrication de médicaments vitaux.

Une étude pour influencer les politiques de santé

Cette recherche, commandée par l’organisation Enda Santé en collaboration avec l’ONG kényane Kelin, s’inscrit dans un projet couvrant 25 pays, dont le Sénégal. Selon le Dr Papa Djibril Ndoye, directeur adjoint d’Enda Santé, les résultats serviront de base à un plaidoyer de la société civile. L’objectif est clair : inciter les gouvernements à adopter des politiques publiques permettant un accès élargi et équitable aux traitements contre le VIH, la tuberculose, le cancer et autres maladies prioritaires.


Sources :

  • Faye, D. (2025, 2 mai). Accès aux médicaments contre le Vih, la tuberculose… : Plusieurs barrières décelées. Le Quotidien Sénégal. lequotidien.sn
  • Entretien avec le Pr Papa Gallo Sow – Université Alioune Diop de Bambey
  • Enda Santé & ONG Kelin – Rapport 2023 sur l’accès aux médicaments dans 25 pays

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